Tout ne peut pas être écrit dans un accord aussi la connaissance de l'intérêt du partenaire est primordiale (enjeux, intérêts, inconvénients, risques, choix préférentiels et regrets ; un regret en théorie des jeux est l’intérêt offert par une solution « apparemment » plus avantageuse à laquelle on renonce). Cette connaissance permet d'inclure dans l’accord l'engagement de privilégier la solution la meilleure pour son partenaire lorsque plusieurs solutions équivalentes (pour soi) se présentent. Elle permet aussi d'éviter les choix involontairement préjudiciables au partenaire ou de verser dans le risque inverse du perdant-perdant.
Un accord gagnant-gagnant est plus fiable si tous les participants ont la même perception des intérêts et risques de chacun. (S'ils sont subjectifs, un moyen de se mettre d'accord est : chaque partenaire réalise sa propre estimation puis les résultats sont discutés et une valeur commune est arrêtée.)
Une fois l'accord signé et mis en œuvre, les partenaires agissent souvent à l'instinct, par réflexe, ou n'ont pas le temps de réfléchir aux conséquences de leurs décisions. Pour éviter les entorses inopinées à l'accord, des dispositions utiles peuvent être prises :
* Recenser les erreurs possibles les plus fréquentes et les plus graves et prévoir les réactions que les personnes concernées devront avoir.
* Spécifier ces éléments dans l'accord.
* Si possible remplacer ces réactions humaines par des dispositions "automatiques".
* Communiquer efficacement dans les organisations partenaires afin d’éviter les pertes de confiance passagère d’une des personnes chargées d’appliquer l’accord ou même un refus d’appliquer des dispositions jugées inéquitables (principe de rationalité limitée).
Pour consolider un accord gagnant-gagnant il est possible, durant la phase de négociation, de spécifier les pénalités (« représailles » en théorie des jeux) applicables lorsque l'accord n'est pas respecté :
* Les pénalités peuvent être "automatiques", à condition qu’elles ne génèrent pas de contre-pénalités elles-mêmes automatiques.
* Les pénalités doivent être proportionnées au tort causé, surtout si elles sont automatiques, afin d’éviter l’effet boule de neige.
* Ces pénalités et leur mode de déclenchement (automatique ou non) doivent être connus pour que l’effet de dissuasion puisse jouer.
* Des moyens d’échapper aux pénalités peuvent être prévus s’ils restent dissuasifs (compliqués, longs, incertains).
Le gagnant-gagnant ne touche pas seulement les signataires mais aussi le système (social ou autre) dans lequel il s'inscrit. Des conséquences fâcheuses conduiraient à pénaliser indirectement les signataires de l’accord (principe systémique). Donc avant d'entériner un accord durable entre des partenaires :
* Recenser les groupes (sociaux…) externes à l’accord et préciser pour chacun d’eux les 6 éléments : enjeux, intérêts, inconvénients, risques, préférences et regrets. Reconsidérer l’accord si un déséquilibre apparaît.
* Voir ce que la répétition de cet accord donnerait à long terme entre les mêmes signataires, et aussi plus globalement ce que la généralisation entre tout partenaire du même type donnerait à long terme. On peut se rendre compte que pour l'intérêt du bien commun, et donc des signataires eux-mêmes, l'accord doit être modifié.
* Éventuellement, associer à l’accord certains partenaires extérieurs identifiés.
Exemples de situations ou la généralisation met en évidence un accord optimum différent de celui envisagé
* Lorsqu’un joueur de foot se blesse en participant à un match de l'équipe nationale, indemniser son club d'origine est une bonne chose à court terme, mais, globalement, n’est pas optimisé pour les clubs eux-mêmes ; en effet cela entraîne de multiples démarches administratives, procédures, chiffrages du préjudice, contestations, appels... Ainsi, il vaudrait mieux pour tout le monde considérer la blessure comme si elle s’était produite dans le club d'origine, et porter les efforts sur les bonnes pratiques permettant de prévenir les risques, tant dans l'équipe nationale que dans les équipes locales.
* Avant d'entériner un jugement ou une jurisprudence voir ce que la répétition et la généralisation de cette décision donneraient à long terme. On peut se rendre compte que pour l'intérêt du bien commun, et donc aussi des parties concernées à l'instant présent, le jugement doit être différent.
* Un accord illicite entre concurrents peut être remplacé par un accord gagnant-gagnant plus large incluant les clients.
Conclusion
L’aspect le plus difficile d'une démarche gagnant-gagnant est de persuader chacun que pour maximiser son gain personnel il faut faire gagner ses partenaires et leur fournir une information transparente. Des signataires convaincus ne suffisent pas : ils doivent ensuite étudier avec soin les communications et argumentaires aptes à entraîner leurs personnels dans la démarche.