L'altermondialisme

Le mouvement prend racine au début des années 1980 dans les pays du Sud avec la lutte contre la dette, l'OMC et les plans d'ajustement structurels du FMI mais il reste alors inaperçu en Occident. Il apparaît en Europe, aux États-Unis et en Corée à partir de 1994, dans le cadre d'une critique du chômage, de la précarisation du travail et la remise en cause de la protection sociale. Les manifestations de Seattle en 1999 sont les premières manifestations médiatisées altermondialistes. Elles sont suivies par le rassemblement de Gênes en 2001 (avec la mort d'un manifestant tué par balle par la police italienne) contre le sommet du G8 et les Forums sociaux mondiaux de Porto Alegre de 2001 à 2003 et de Mumbai en 2004. En novembre 2002 s'est également tenu le premier Forum social européen à Florence, au cours duquel 450.000 à 1 million de personnes ont défilé contre la guerre en Irak et pour un autre monde. En tant que lieux d'échanges et évènements médiatiques, les forums sont les espaces et les moments privilégiés du mouvement.

Composition Le mouvement altermondialiste résulte de la convergence et de la multiplicité de mouvements. Il regroupe des personnes d'horizons très divers: paysannerie, couches populaires et petite bourgeoisie du Sud, pauvres et salariés précaires des pays industrialisés, syndicats ouvriers et enseignants, associations de consommateurs, de chercheurs, de jeunes, mouvements écologistes, anti-militaristes, féministes, communistes, marxistes, nationalistes, keynésiens et anarchistes... Pour cette raison, cette mouvance est appelée parfois le mouvement des mouvements.

Cette diversité se reflète dans le grand nombre d'organisations se revendiquant altermondialistes. Le point de vue altermondialiste connaît également un écho parmi certains dirigeants des PMA, ainsi que certains l'ont exprimé dans la déclaration de Dhaka ou dans leur appartenance au mouvement des non-alignés.

Convergence d'une multiplicité de mouvements et d'associations, la mouvance altermondialiste n'a pas d'organisation en elle-même. Elle constitue un réseau au fonctionnement "horizontal", refusant les hiérarchies verticales. Les associations réunies au sein du mouvement peuvent d'ailleurs être organisées suivant ce modèle (ainsi dans l'Union syndicale Solidaires en France), mais certaines organisations comme ATTAC France reproduisent dans leur structure une hiérarchie pyramidale en octroyant un pouvoir décisionnel important à une minorité, comme le collège des fondateurs d'ATTAC.

Les altermondialistes cherchent à développer des réseaux internationaux (cfr: la structure des mouvements ATTAC, ou Indymedia), notamment à travers des forums mondiaux, tel le Forum Social Mondial de Porto Alegre, afin d'y développer des synergies internationales entre les différents mouvements.

Orientations Le terme anti-mondialisation a été le premier utilisé par les journalistes pour désigner le mouvement contestataire. En 1999, le terme altermondialisme ou altermondialisation, d'origine belge, fut introduit dans la francophonie pour mettre en avant le caractère favorable d'une partie du mouvement à une forme de mondialisation. Malgré l'attribution de tendances nationalistes et/ou anti-capitalistes au terme anti-mondialisation, la spécificité des deux termes reste assez imprécise.

La pluralité des orientations politiques au sein du mouvement est difficile à synthétiser. Il est possible de décrire un certain nombre d'orientations spécifiques au sein du mouvement :

- Les antilibéraux qui critiquant le modèle du libre échange (cfr critique du libéralisme économique ) veulent réformer en profondeur les principes de la logique économique, sur la base de critères sociaux et moraux. Ils proposent de taxer les flux de capitaux spéculatifs (Taxe Tobin).

- Les communistes et marxistes qui défendent une forme d'internationalisme. Les communistes se sont liés au mouvement altermondialistes sur des bases anticapitalistes, s'opposant traditionnellement à la mondialisation économique capitaliste, qui serait celle de la classe bourgeoise, et prônent la mondialisation de l'action des peuples (ou du prolétariat) selon un modèle social et solidaire. Tous les communistes ne se sentent pourtant pas altermondialistes : en France, si des partis comme le PCF ou la LCR se rapprochent de la mouvance, Lutte Ouvrière garde ses distances.

- Les souverainistes ou nationalistes qui, ayant pour but déclaré de protéger la nation du néo-libéralisme des marchés et de l'insécurité sociale qui en découlerait (chômage, dumping social, délocalisations), prônent des mesures protectionnistes d'intérêt national ou régional en matière d'économie. Cette dernière catégorie est clairement antimondialiste.

La plupart des tendances s'accordent sur un compromis que l'on retrouve aussi dans la tendance modérée, celle des «réformateurs modérés» qui sont partisans du libre-échange mais souhaitent que le marché soit régulé selon des impératifs sociaux et environnementaux, par exemple le principe de souveraineté alimentaire.

Positions Si la diversité du mouvement s'avère efficace en tant que front de contestation, son manque d'homogénité empêche le mouvement de produire un programme politique clair et de canaliser ses partisans dans une voie unique. Cependant, une orientation commune se dégage sur des thèmes généraux comme la lutte pour le développement, les droits fondamentaux comprenant la souveraineté alimentaire, la paix et la démocratie. Avec un discours souvent idéaliste, l'altermondialisme se veut un moteur de lutte sociale. Il a désigné comme son principal adversaire idéologique le néo-libéralisme.

La critique des altermondialistes se base sur le constat que les écarts de pauvreté et de domination sont grandissants entre les pays du Nord, principalement l'Amérique du nord et l'Europe d'une part, et une majorité des pays du Sud dont l'Afrique subsaharienne et les PMA d'autre part. Les altermondialistes sont aussi préoccupés par la croissance des inégalités entre la proportion mondiale la plus riche et la plus pauvre, ainsi que par l'insécurité écologique qui serait engendrée par la pollution industrielle, l'effet de serre, les OGM (voir Lutte anti-OGM), ou encore les armes chimiques et nucléaires.

Les altermondialistes accusent également les grandes compagnies transcontinentales et les organes financiers et commerciaux internationaux de favoriser, directement ou indirectement, des intérêts privés plutôt que l'intérêt général par la recherche de profits au détriment des facteurs sociaux et écologiques (voir externalité négative et les difficultés à appliquer le protocole de Kyoto ou la Bourse du carbone).

En particulier, ils critiquent la valorisation des politiques de délocalisations qui sont selon eux négatives à la fois pour les pays développés (car menaçant la stabilité et le volume de l'emploi, la sécurité sociale ou le minimum salarial) et pour les pays du Sud (car favorisant le dumping social et l'exploitation par le Nord plutôt que le développement local des pays du Sud).

La pensée altermondialiste veut, d'une part, faire prendre conscience des méfaits qu'elle attribue au néo-libéralisme, déconstruire ce qu'elle appelle le "dogme néo-libéral", et, d'autre part, proposer des réformes ou du moins des alternatives.

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Strategie
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Date de publication :
02 mai 2006