La réflexion économique apparaît d'abord en Grèce antique et en Chine antique, là ou une production marchande et une économie monétaire semblent avoir été développées en premier. Le mot économie vient d'ailleurs du grec (de oikos, la maison, notamment en tant qu'unité sociale et économique, et nomos, l'ordre, la loi).
Parmi les penseurs, souvent philosophes, qui se sont intéressés à l'économie, Platon et son élève Aristote sont probablement les plus connus. Les philosophes grecs subordonnent l'économie à la politique : c'est l'art d'administrer ses biens ou sa cité. La science économique n'existe pas, au contraire de la science politique, qui se rapporte à la cité et est considérée par bien des Grecs comme la première des sciences. L'économie, que l'on n'envisage que centrée sur l'individu, est souvent vue de façon suspecte, et comme une activité servile. On peut observer la place de l'économie dans la société antique et comment elle était perçue à ses débuts à partir de quatre figures : Thalès, Xénophon, Platon et Aristote.
Thalès de Milet (circa 625 – 547 av. J.-C.) n'a jamais écrit sur l'économie, mais son histoire montre un des premiers exemples de spéculation économique, un corner sur le pressage d'olives. Alors qu'on lui reprochait l'inutilité de la philosophie qui ne permettait aucune application avantageuse et que l'on raillait sa pauvreté constante, il se livra à différents calculs astronomiques. Ceux-ci lui permirent de prévoir une période particulièrement chaude et ensoleillée, durant laquelleon ferait vraisemblablement une abondante récolte d'olives. Il loua donc tous les pressoirs à olives des régions de Milet et de Chios à bas prix, quand ils n'intéressaient personne. Ses prévisions se révélèrent exactes, et quand advint le moment de la récolte, la demande en pressoirs se fit extrêmement importante. Thalès, qui détenait un monopole régional, put sous-louer les pressoirs aux conditions qu'il demandait, se plaçant par là à la tête d'une certaine fortune.
Si cette anecdote ne révèle pas une analyse poussée des mécanismes économiques, elle les préfigure en ce qu'elle montre une réflexion sur des stratégies financières, reposant sur des idées diffuses de la loi de l'offre et de la demande, ou du monopole et de ses conséquences.
Il est nécessaire d'évoquer Xénophon (circa 426 – 355 av. J.-C.), qui comme Platon fut élève de Socrate, à propos de l'histoire de la pensée économique : non seulement parce qu'il est le premier à employer ce terme, mais également parce qu'il y consacrera tout un ouvrage, L'Économique (qui consiste en un dialogue entre Socrate et Ischomaque), autour d'un thème unique, celui de l'administration d'un domaine agricole. On peut ainsi se rendre compte combien dans l'antiquité le terme est lié à l'idée de l'administration domestique ; cependant le dialogue en vient presque à porter sur des stratégies d'accroissement des richesses, le père d'Ischomaque achetant par exemple des terres à bas prix pour les revendre bien plus cher après les avoir défrichées. En vérité, celui qui connaît l'art – ou la science – de l'économie est de facto un bon gestionnaire, et ce dans toute situation. Le bon père de famille peut ainsi savoir ce qui est bon pour l'administration d'une cité. C'est toutefois à la femme que revient le rôle de l'entretien de la maison (oikos), de même la politique est l'affaire des hommes, et le travail, réservé aux seuls esclaves. Dans L'Économique, Ischomaque enseigne cet art à sa femme : ce sera le rôle de celle-ci que d'en faire l'application.
Sur la fin de sa vie, Xénophon écrira également Les Revenus, ouvrage où il propose de multiplier les exploitations agricoles et industrielles dans l'Attique, et notamment d'exploiter à plein rendement les mines d'argent. À cette occasion il aborde (mais de façon peu approfondie) des concepts comme ceux de la demande et de la valeur des biens, et du rapport qu'ils entretiennent entre eux. L'œuvre est un projet politique et économique pour toute une région, et tente de défendre un point de vue cohérent.
En définitive, les ouvrages de Xénophon portent sur la manière de gérer un domaine agricole, et sur l'économie domestique [l'expression serait, en grec, tautologique] ; Les Revenus montre cependant bien que ces enseignements sont applicables ailleurs, et place l'économie comme art de satisfaire les besoins d'une société. On peut pour Xénophon extrapoler de l'étude d'une microentité : n'est-ce pas le prémisse de la microéconomie ?
Platon (427 – 348 av. J.-C.) qui à travers son dialogue La République expose sa vision de l'utopie se trouve entraîné à aborder l'économie comme gestion des biens et des personnes de la façon la plus juste possible dans la cité idéale.
Il défend ainsi l'idée d'une société divisée en trois classes (magistrats/philosophes, gardiens et travailleurs/producteurs, en ordre décroissant) où le droit de propriété n'est réservé qu'à la classe inférieure des « producteurs » : les autres classes ne doivent pas être tentées par le lucre et l'accumulation des richesses. Le philosophe sait que la cité est supérieure à l'individu ; pour préserver l'équilibre de la cité et parvenir au plus haut degré de la vertu politique, il est nécessaire de poser une limitation de la fortune et des biens de chacun, d'autant plus que pour Platon et son époque la quantité totale de richesse est imaginée comme à peu près fixe. Il expose de cette façon une forme d'organisation sociale basée sur la communauté des biens et propose même dans Les Lois un partage égalitaire de la terre. L'économie platonicienne cherche ainsi à régir la répartition des ressources, et ce à une fin politique et philosophique. Moins qu'un art, l'économie pour Platon se rapprocherait donc plutôt de ces savoir-faire décrits dans Gorgias ; il n'en demeure pas moins que ses tentatives d'organisation d'une cité parfaite impliquent souvent des préoccupations qui sont purement de l'ordre de la science économique telle qu'on la connaît aujourd'hui.
Platon, le premier, s'intéresse strictement au problème de la cité et de la manière dont il faut qu'elle soit régie, et ce sur tous les plans. Il tire de son étude un modèle social et économique basé sur le collectivisme à plusieurs niveaux (biens, femmes, terres) tout en ne remettant pas en cause le principe de l'État (la cité de Platon n'est donc pas socialiste). Dans d'autres œuvres, il confirmera la validité du recours à l'esclavage comme moyen technique. Il critique en revanche de façon générale la volonté de possession, l'appât des richesses, l'esprit de lucre.
Chez Aristote (circa 384 – 322 av. J.-C.), on trouve une place beaucoup plus importante consacrée à l'économie : il s'agit de ce point de vue d'un auteur fondamental dans l'Antiquité, et qui aura une très grande influence durant toute la période médiévale.
Aristote montre avec Les économiques et l'Éthique à Nicomaque la différence fondamentale entre l'économique et la chrématistique. La chrématistique (de khréma, la richesse, la possession) est l'art de s'enrichir, d'acquérir des richesses. Selon Aristote, l'accumulation de la monnaie pour la monnaie est une activité contre nature et qui déshumanise ceux qui s'y livrent : suivant l'exemple de Platon, il condamne ainsi le goût du profit et l'accumulation de richesses. Le commerce substitue l'argent aux biens ; l'usure crée de l'argent à partir de l'argent ; le marchand ne produit rien : tous sont condamnables d'un point de vue philosophique. Bien qu'Aristote traite de la chrématistique comme ensemble de ruses et de stratégies d'acquisition des richesses pour permettre un accroissement du pouvoir politique, il la condamnera toujours en tant que telle.
Au contraire, l'agriculture et le « métier » permettent de fonder une économie naturelle où les échanges et la monnaie servent uniquement à satisfaire les besoins de chacun, ce qu'il valorise. Aristote garde toujours le souci d'agir conformément à la nature. Celle-ci fournit « la terre, la mer et le reste » : l'économique est ainsi l'art d'administrer, d'utiliser les ressources naturelles, totalement à l'opposé de l'art d'acquérir et de posséder. Y est incluse l'idée d'un rapport de réciprocité : Aristote ne sépare pas l'économique du social, établissant l'échange comme un « retour sur équivalence » ; on comprend donc qu'il condamne la chrématistique, qui substitue l'objet à la relation sociale puis l'argent à l'objet.
De fait, l'échange, basé sur la monnaie, est toujours envisagé chez Aristote comme permettant de renforcer le lien social : il établit son inexistence dans la tribu (où seul le troc existe) et son apparition avec la cité, c'est-à-dire la société.
Car s'il n'y avait pas d'échanges,
il ne saurait y avoir de vie sociale ;
Ni d'égalité sans commune mesure.
Ainsi, l'apport d'Aristote est tout d'abord une distinction fondamentale qu'il établit entre économie naturelle (économique) et économie d'argent (chrématistique) ; de là une réflexion fine sur le rôle de l'échange dans le lien social. Un autre résultat original et remarquable des réflexions d'Aristote est la différenciation qu'il fait entre valeur subjective et valeur commerciale d'un bien, que l'on peut facilement rapprocher des notions de valeur d'usage et de valeur d'échange qui apparaîtront chez Adam Smith au XVIIIe siècle.